Une étude montre que les pauvres paient plus pour tout

Parce qu’ils vivent dans de petits logements, le prix au mètre carré est plus élevé. Parce que votre voiture est plus ancienne, elle consomme plus de carburant. Comme ils n’ont pas de machine, ils paient la lessive chaque semaine. Au quotidien et pour un service identique, les ménages français les plus pauvres ont tendance à dépenser plus que les classes moyennes. Si cet effet de “double sanction” est corrigé en partie avec l’aide sociale, ce n’est pas toujours le cas, souligne “L’étude de la double peine de pauvreté en France” Publié ce lundi 17 octobre.

“Ce phénomène insidieux touche de nombreuses catégories de dépenses”Jacques Berger, directeur de l’association Action Tank Entreprise et Pauvreté, qui a réalisé cette étude avec le cabinet Boston Consulting Group, à la demande de La Banque Postale, a précisé à l’AFP. Pour y parvenir, ils se sont notamment appuyés sur les données de l’INSEE, comparant les ménages les plus pauvres à ceux de la classe moyenne.

Gaz, m2 : logement où tout coûte plus cher

Des surfaces plus petites à un prix au mètre carré plus cher. Ce phénomène, appelé « effet de surface », pénalise principalement les ménages les plus pauvres. “Avec des moyens plus limités, les ménages pauvres se tournent vers des logements moins spacieux. Or, le prix du m² augmente quand la surface totale se réduit.” L’étude de l’association Action Tank Entreprise et Pauvreté et du cabinet Boston Consulting Group s’est concentrée sur les prix des loyers dans différentes villes, de Bordeaux à Paris en passant par Lille. Voici ce qui ressort : “Les ménages pauvres ont en moyenne un revenu surévalué de 3%”comparativement à 1,4 % pour un ménage moyen.

Une situation qui, en plus du facteur purement économique, crée des situations d’inconfort. Les logements occupés par les ménages pauvres sont plus humides que les autres, plus petits mais aussi plus bruyants. Facteurs qui “aggraver les problèmes de santé, qui ont un impact direct sur les dépenses de santé”. Et surtout, par effet de cascade, la moins bonne isolation de ces logements augmente également les coûts de gaz et d’électricité. Elle touche principalement les familles qui se chauffent au gaz. Le prix des abonnements au service et le prix à la consommation génèrent un écart de 13%, pour cette dépense, entre ménages pauvres et moyens.

Des voitures qui consomment plus d’essence

Les transports, et en particulier les automobiles, constituent également un poste de dépenses plus important pour les ménages les plus pauvres. Là encore, ils subissent cette double sanction, selon l’étude. Entre dépenses élevées et difficulté à obtenir un crédit, “les ménages pauvres ont un accès compliqué à la possession de véhicules neufs”précise l’étude, et ajoute qu'”alors ils recourent au marché de l’occasion. Des voitures achetées moins chères, mais qui ont déjà parcouru plusieurs dizaines de milliers de kilomètres. Résultat : “ils consomment plus de carburant et nécessitent plus d’entretien (coûts d’entretien plus élevés)”.

Rien qu’en dépenses énergétiques, la facture annuelle est supérieure de 17% chez les ménages les plus pauvres. Et pour l’entretien des véhicules, ce chiffre grimpe à 121 %. En revanche, les familles qui utilisent les transports en commun peuvent bénéficier de tarifs adaptés au niveau de vie des ménages. Concernant ce facteur de dépense, la double sanction est donc générée fondamentalement par les voitures particulières.

De la piste à la machine à laver

Si vous n’avez pas de machine à laver, vous devez aller laver votre linge à la laverie. Et même le sécher. Une dépense, à chaque fois, de plusieurs euros. C’est une illustration de plus de cette double peine subie par les ménages pauvres et que l’étude pointe du doigt. Certaines maisons n’ont tout simplement pas d’appareils électroménagers, et l’absence de réfrigérateur, par exemple, « entraîne une évolution du régime alimentaire vers des produits mieux conservés ». “Quand les logements sont équipés, ils ont des équipements plus anciens, ce qui génère une surconsommation d’électricité, d’eau, de gaz qui impacte la facture énergétique”, souligne également l’étude publiée lundi. Alors que 97,5% des ménages moyens sont équipés d’un lave-linge, seuls 90,3% des ménages pauvres en ont un à la maison. Les “double malus moyen sur les frais de machine à laver pour les ménages pauvres” il est donc ici de 28 %.

Tel que représenté par le loyer ou le ticket d’essence, le surcoût dont sont victimes les ménages pouvres se retrouve dans los posts de pense de la vie quotidienne, de l’assurance à l’obtention d’un crédit en passant par le forait Internet . Parce que ? L’étude a identifié quatre facteurs qui conduisent à ces sanctions : “Un effet volume” avec des tarifs de location plus élevés ; “Un effet d’exclusion” en particulier dans l’achat de voitures moins chères mais plus économes en carburant ; “Manque d’information ou mauvais arbitrages” par exemple dans les contrats d’assurance et “un effet de localisation”, qui joue notamment en assurance habitation.

Un surcoût global élevé pas toujours compensé par les aides

“En 2022, on estime que la double sanction brute annuelle s’élève à 1 536 € soit 8,7% des dépenses”résume l’étude menée par l’association Action Tank Entreprise et Pauvreté et le Boston Consulting Group. “Certaines aides permettent de réduire leurs effets à 96 € de sanction annuelle double net”, qui ne représente que 0,6 % des dépenses. Au niveau mondial, “En fonction de leurs profils et de leur capacité à bénéficier ou non de ces aides, de nombreux ménages font face à un malus double net pouvant atteindre plusieurs milliers d’euros par an.” Certains ménages n’effectuent pas les démarches pour les obtenir, indique également l’étude.

Verser “lutter contre ce phénomène de double peine”, l’étude recommande aux entreprises “développer des offres inclusives qui ont un double effet de réduction de pénalité”. « Les pouvoirs publics ont aussi un rôle à jouer : à travers une réglementation qui protège les clients les plus vulnérables et qui réduit les doubles peines »Elle ajoute.