Le Credit Suisse est de retour dans l’actualité. Après une semaine agitée sur les marchés, la banque propose ce vendredi de racheter quelque 3 milliards de francs suisses (3100 millions d’euros) de sa propre dette, libellée en dollars, euros et livres sterling. La banque entend ainsi « profiter des conditions de marché pour racheter de la dette à des prix attractifs »a-t-il déclaré dans un communiqué. En effet, la banque a l’intention de racheter ces titres à 96% du pair (valeur nominale), selon l’agence Bloomberg, une décote intéressante pour un groupe bancaire de cette taille.
Cette annonce vise clairement à rassurer à la fois les investisseurs et les grands clients. Cette dernière pourrait, en effet, être gagnée par les inquiétudes soulevées ces derniers jours sur la santé du numéro deux du secteur bancaire suisse, dont la réputation est ternie depuis deux ans par des scandales à répétition.
Mission partiellement réussie, du moins à court terme. Le cours de l’action a gagné plus de 5% dans un marché globalement baissier (cependant le titre est en baisse de 50% depuis janvier) et surtout le cours des CDS, lele coût de la protection contre le risque de défaut, commencé à reculer vers les 300 points de base, après avoir approché les 345 points de base lundi, suite à la publication d’un article dans le temps financiers rendre compte des efforts déployés par le management de la banque pour convaincre clients et investisseurs de la solidité du bilan du groupe.
Une course contre la montre puisque le nouveau CEO, Ulrich Köner, fraîchement nommé en juillet dernier, présentera le 27 octobre son plan de redressement de la banque. En rachetant sa dette, le Credit Suisse suit les traces de la Deutsche Bank en 2016, qui a également acheté des milliards de dollars de sa propre dette au milieu de rumeurs sur sa santé financière.
Encore une fois, le CDS a servi de signal d’avertissement. Ces instruments dérivés sont considérés comme une protection contre la faillite d’un émetteur. En pratique, ils sont principalement utilisés à des fins spéculatives, comme la plupart des produits dérivés. Cependant, le CDS donne une indication du niveau de la prime de crédit (spread) que l’émetteur doit payer par rapport à un actif sans risque.
Alors que le prix des CDS du Credit Suisse oscille autour de 300 points de base, un niveau bien supérieur à celui de 2009, au plus fort de la crise financière, le prix des CDS du concurrent UBS oscille autour de 125 points de base et de BNP Paribas autour de 80 points de base. Cela montre le niveau de méfiance atteint par le Credit Suisse sur le marché.
Faillites et amendes
Certes, l’historique d’investissement de la banque, le fameux audio enregistré, fait peur. C’est d’abord la faillite de la société financière Greensill, en mars 2021, qui met en difficulté l’établissement bancaire, qui lui avait engagé 10 milliards de dollars. Quelques semaines plus tard, un autre coup est venu avec l’implosion d’Archegos qui avait coûté à la banque quelque 5 milliards de dollars. La banque suisse doit alors enregistrer une charge de 4,4 milliards de francs suisses sur ses comptes pour couvrir les dégâts.
En octobre 2021, la banque a été condamnée à verser près de 475 millions de dollars aux autorités américaines et britanniques pour régler des créances liées à des prêts au Mozambique faute de contrôle interne. De plus, en juin 2022, il y a eu une condamnation en Suisse pour blanchiment d’argent aggravé.
problèmes de gouvernance
Le gouvernement du groupe fait également la une des journaux. En 2019, une incroyable histoire d’espionnage a provoqué le départ du capodastre charismatique de l’époque, Tidjane Thiam. Cet été, le président du Credit Suisse, Antonio Horta-Osorio, a été contraint de démissionner après avoir enfreint les consignes sanitaires. C’est désormais au discret banquier germano-suisse Ulrich Körner, de son concurrent UBS, de relever la barre. Les conclusions de sa revue stratégique seront donc connues le 27 octobre, sans filtrer les informations sur les décisions qui seront prises pour le moment ; notamment en matière de cession d’actifs. La vérité est que l’environnement économique et de marché est aujourd’hui moins favorable à la vente d’actifs qu’il ne l’était hier.
Dans un communiqué daté du 26 septembre, la banque a indiqué qu’elle était “en bonne voie avec son examen stratégique complet, y compris les cessions et ventes potentielles d’actifs”. “Alors qu’il y a eu un niveau accru de spéculation dans les médias et sur les marchés quant à son résultat potentiel.”l’établissement a réaffirmé sa volonté de faire le point sur cette revue stratégique “27 octobre” lors de la publication de ses résultats du troisième trimestre. D’autre part, avec ses employés auxquels Ulrich Körner s’est adressé dans une note début octobre. Reconnaissant les incertitudes et le bruit du marché, le président a toutefois évoqué une récente conférence sur la gestion de fortune dont le thème était « Rising like the phoenix », qui est selon lui « une bonne métaphore de ce que nous voulons réaliser ».
Des ratios de liquidités « extrêmement solides »
En définitive, les analystes ne croient pas à un scénario catastrophe à la « Lehman Brothers », cette banque américaine dont la faillite a précipité la crise financière en 2008. Selon Guillaume Larmaraud, associé en charge des services financiers chez Colombus Consulting, Credit Suisse “reste une institution financière solide”. Pour John Plassard, directeur de Mirabeau, « ceux qui parient sur la faillite du Credit Suisse se trompent et rappelle-toi que « des ratios de fonds propres extrêmement solides ».
soutien inconditionnel du gouvernement
Par ailleurs, le gouvernement suisse s’apprête à voter un filet de sécurité pour soutenir les grandes banques considérées comme à risque systémique. ” L’une des qualités de la Suisse est d’avoir un service bancaire extrêmement efficace. Dès lors, il est évident que le gouvernement ne laissera pas tomber un établissement de cette ampleur en cas de crise »souligne, rappelant qu’en 2008, l’exécutif de l’époque avait volé au secours d’UBS.
sans oublier que «La Finma surveille de près la situation du Credit Suisse en ce moment, pour éviter un phénomène de contagion si la banque avait des problèmes», précise John Passard. Finalement, ” la banque nationale suisse a également annoncé suivre de près l’évolution de la situation.. Tous les regards sont donc tournés vers le Crédit Suisse, qui n’a pas fini d’en parler.
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